La cérémonie de commémoration du 222ᵉ anniversaire de la bataille de Vertières, organisée à la Villa d’Accueil, aura surtout servi de vitrine protocolaire pour le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et le Président du Conseil Présidentiel de Transition, Laurent Saint Cyr. Les deux dirigeants, entourés de représentants d’institutions républicaines, du corps diplomatique et de la société civile, ont multiplié les discours solennels, sans offrir la moindre garantie concrète à un pays qui s’enlise chaque jour davantage dans les crises économique, sociale, sécuritaire et humanitaire qu’eux-mêmes reconnaissent pourtant.
Comme souvent dans ce type d’événement officiel, Vertières a été invoqué comme un mantra : unité, courage, détermination, héritage moral… Les autorités ont rappelé que la bataille de 1803 demeure un repère historique et une source d’inspiration. Mais cette rhétorique, répétée année après année, peine à masquer la distance abyssale entre l’héroïsme célébré et l’impuissance politique actuelle. Les mots sur « l’adversité surmontée » sonnent creux dans un pays où l’adversité continue de gagner du terrain.
Le Premier ministre a profité de la tribune pour mettre en avant ses efforts visant à « moderniser et renforcer les Forces Armées d’Haïti », censées garantir la sécurité et soutenir la stabilité nationale. Là encore, les promesses s’enchaînent, mais le communiqué ne donne aucune indication sur l’impact réel de ces initiatives ni sur leur pertinence pour répondre à l’urgence sécuritaire que vit la population.
Quant aux appels à la cohésion nationale, à la stabilité institutionnelle, au relèvement économique et social ou encore à la tenue d’élections, ils tiennent plus du catalogue d’intentions que d’un plan d’action. Les autorités affirment vouloir créer des « conditions propices » au redressement du pays, sans expliquer pourquoi ces conditions n’ont toujours pas émergé ni comment elles comptent les instaurer.
L’évocation de « solidarité », de « justice » et de « responsabilité collective » clôture un discours officiel où la solennité remplace une fois de plus la substance. On appelle la jeunesse à construire un avenir « plus sûr, plus stable, plus prospère », alors que les dirigeants eux-mêmes peinent à poser les premiers jalons de cette sécurité, de cette stabilité et de cette prospérité.
En définitive, cette commémoration du 18 novembre 2025 a davantage mis en lumière le décalage entre les ambitions proclamées et la réalité vécue par le peuple haïtien que la volonté réelle d’honorer l’esprit de Vertières. Un esprit qui, aujourd’hui plus que jamais, exige moins de discours et davantage d’actes.
Mozard Lombard,
mozardolombardo@gmail.com