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Un Programme de Renforcement ou une Opération de Communication ?

Sous les lustres du Karibe Convention Center, le gouvernement de transition a lancé avec grand apparat son Programme de Renforcement des Capacités des Partis Politiques. Une cérémonie soigneusement chorégraphiée, des discours bien huilés, et un vocabulaire où les mots « transparence », « démocratie » et « responsabilité » se succédaient comme une litanie. Mais derrière cette mise en scène, une question demeure : que reste-t-il de concret dans un pays où la vie politique est à l’agonie et les institutions en lambeaux ?

Le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé a vanté une « initiative d’envergure nationale », censée redynamiser la vie politique. Pourtant, cette annonce sonne comme une répétition d’un scénario mille fois joué : un projet financé, des firmes locales choisies « pour leur expertise », et une promesse d’élections « libres, inclusives et apaisées » que personne n’ose plus croire. Le tout dans un contexte où ni les partis politiques ni la population n’ont confiance dans le pouvoir en place.

Trois entreprises haïtiennes se partageront la mise : CPDEP, Groupe Croissance S.A. et DAGMAR S.A. — des noms bien connus dans les cercles du pouvoir et des marchés publics. Ces firmes auront pour mission de « moderniser » la classe politique, une ambition qui paraît presque ironique quand on sait que la plupart des partis ne disposent ni de siège réel ni d’organisation interne digne de ce nom. On formera donc à la gouvernance, à l’éthique et à la communication ceux-là mêmes qui, depuis des décennies, ont transformé la politique en affaire de clientélisme et de survie.

Autre prouesse annoncée : la création d’une plateforme numérique d’enregistrement des partis politiques, développée par GSIS. Un outil « majeur », selon le communiqué, pour assurer la transparence. Mais dans un pays où les bases de données publiques disparaissent au gré des crises, et où la cybersécurité reste un mythe, difficile d’y voir autre chose qu’un gadget technocratique de plus.

Au fond, ce lancement ressemble moins à un véritable engagement démocratique qu’à une opération de communication politique. Le gouvernement cherche visiblement à se donner une image de transition vertueuse, alors même que les élections — encore hypothétiques — n’ont ni date, ni cadre légal, ni garantie de sécurité.

Former plus d’un millier de représentants de partis ? Fort bien. Mais former à quoi, et pour quel horizon ? La démocratie haïtienne ne manque pas de discours, elle manque de crédibilité, de moyens réels et de volonté politique. Sans ces éléments, ce programme risque d’être un de plus sur la longue liste des projets « institutionnels » qui nourrissent les conférences, mais jamais la confiance du peuple.

Au Karibe, samedi, on a célébré la « renaissance » de la vie politique. Mais dans les rues de Port-au-Prince, c’est toujours le silence du désenchantement qui domine. Et aucune session de formation, aussi bien présentée soit-elle, ne suffira à le rompre.

Mozard Lombard,

mozardolombardo@gmail.com

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