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Dans un contexte politique déjà tendu, la ministre des Affaires étrangères d’Haïti, Dominique Dupuy, fait à nouveau parler d’elle en procédant la semainedernière, au mépris de la hiérarchie institutionnelle, à une dizaine de nominations dans la diplomatie haïtienne. Parmi elles figure celle de Panel Lindor comme Consul général à Paris. Le 29 octobre 2024, une cérémonie d’installation discrète a officialisé ce choix, suscitant des interrogatoires sur la manière dont la ministre exerce son pouvoir à un moment où le Conseil présidentiel de transition (CPT) exige un remaniement ministériel.
On sait que Panel Lindor est l’un des pirates numériques qu’utilise Dominique Dupuy pour attaquer ses adversaires et ternir l’image des membres du CPT sur les réseaux sociaux. Mais de là, après l’avoir parachuté Ministre-Conseiller à l’Ambassade d’Haïti près le Royaume de Belgique, à lui donner aussi rapidement une promotion en tant que Consul général à Paris dépasse le stade du népotisme.
Cette nomination, outre le fait qu’elle contrevient à la Constitution haïtienne, représente un acte de défiance voire d’humiliation envers le CPT qui se prépare justement à statuer sur ces hauts postes diplomatiques. Ironiquement, le Premier ministre Garry Conille lui-même avait récemment adressé une cinglante lettre de blâme au ministre de la santé publique et de la population pour non-respect d’une circulaire gouvernementale. Dans le cas de Dupuy, qui se targue d’être la chouchou et donc le bras droit du chef de la Primature, aucune mesure similaire n’a été annoncée, ce qui soulève des doutes sur l’impartialité de la leçon de bonne gouvernance professée par Garry Conille.
Panel Lindor, un personnage sulfureux
Au-delà du contexte de tension institutionnelle, le profil de Panel Lindor ajoute une couche de controverse à cette nomination. Ancien contractuel au Consulat général d’Haïti à Paris, il traîne une réputation marquée par des allégations de détournements de fonds publics et des accusations de harcèlement sexuel. En tant qu’employé affecté au service des passeports, il aurait été impliqué dans des scandales financiers, notamment avec les étudiants haïtiens en Turquie, et aurait détourné des fonds via des transferts via Western Union. Ces allégations, consignées dans un rapport signé par un ancien chef de poste dudit Consulat, précisent en détail les malversations financières reprochées à Panel Lindor.
Après son départ du Consulat, Panel Lindor, avec la complicité présumée de Dominique Dupuy et de Ricarson Dorcé, s’est illustré par des campagnes de dénigrement sur les réseaux sociaux visant des diplomates et d’anciens fonctionnaires haïtiens en France et en Europe. Ce groupe semble se constituer en une bande organisée pour salir la réputation de leurs collègues. Désormais, Dominique Dupuy est ministre, Ricarson Dorcé chef de cabinet, Richnel Ostiné Ministre-Conseiller à l’OEA et Panel Lindor, sous forte pression, exige le poste de Consul général, laissant entendre qu’il pourrait révéler des informations compromettantes pour Dupuy s’il n’obtenait pas le poste.
Des sources indiquent que cette petite bande aurait mis en place des mécanismes pour faciliter la circulation de sommes d’argent importantes, prétendument en lien avec l’ancien Premier ministre Laurent Lamothe, déjà sous sanctions. Ces allégations ajoutent un poids supplémentaire à la crise politique qui ébranle le gouvernement, avec des ramifications qui continuent d’alimenter les tensions au sein de l’Exécutif.
Par ailleurs, il est à noter que Panel Lindor est un résident permanent en France depuis plus d’une dizaine d’années. Ses enfants sont nés dans ce pays. Certaines informations font même croire qu’il détient la nationalité française. On est alors en droit de se questionner sur la raison pour laquelle l’État français accepte cette nomination qui contrevient à la Convention de Vienne de 1963 sur les Relations consulaires. Après tout, le conjoint de la Ministre Dupuy, Cyril Pressoir, est un citoyen français.
La mainmise de Dupuy et les critiques internes
Selon des sources au sein du Ministère des Affaires Étrangères (MAE), Dominique Dupuy aurait soigneusement planifié la promotion de Panel Lindor, au détriment des cadres de cette institution. Car, anciennement ambassadrice d’Haïti à l’UNESCO, elle aurait intégré Lindor dans ses cercles de confiance, l’utilisant régulièrement pour gérer des affaires personnelles louches. Dès sa nomination comme ministre, elle aurait activement travaillé pour lui offrir une position officielle, d’abord comme Ministre conseiller en Belgique il ya trois mois seulement, puis aujourd’hui comme Consul général à Paris.
Les membres du CPT, quant à eux, observent avec inquiétude cette mainmise de Dupuy et de Conille sur la diplomatie haïtienne. Cette nomination, perçue par certains comme un exemple de clientélisme, pose de sérieux questionnements sur la gestion de la diplomatie nationale, déjà affaiblie par son incapacité à traiter de manière sérieuse les relations internationales du pays.
La nomination puis la promotion éclaire de Panel Lindor, surnommé « le chien de garde » de la ministre Dupuy, s’ajoute à une série de nominations controversées dans l’administration Conille. Alors que le pays fait face à des crises sécuritaires et humanitaires sans précédent, ces mouvements diplomatiques sont perçus par une grande partie de la population comme des privilèges dans un gouvernement où les liens affectifs et d’intérêts priment sur les compétences, l’expérience et l’intégrité.
Dans ce climat de crise, ces vagues de nomination, comme en témoigne celle de Panel Lindor, reflètent les luttes de pouvoir ainsi que des manoeuvres de corruption qui caractérisent cette transition politique.
Rédaction Zantray News