Le feu a englouti bien plus qu’un bâtiment : c’est un pan entier de l’histoire haïtienne qui s’est effondré dans les flammes avec la destruction de l’Hôtel Oloffson. Construit au XIXe siècle, ce monument iconique de Port-au-Prince, refuge d’artistes, intellectuels et curieux du monde entier, n’est plus. Il a été victime d’un incendie criminel, une attaque aussi brutale que symbolique.
Dans une rare réaction officielle, le gouvernement haïtien a publié un communiqué condamnant l’acte avec fermeté. Sous le titre « Un acte de trop : l’État haïtien déclare la tolérance zéro », le texte appelle à l’unité nationale et promet que ce « crime contre la nation ne restera pas impuni ». Il y est question de mobiliser toutes les ressources pour « traquer, démanteler et déraciner ces groupes armés » responsables de l’incendie.
Mais cette déclaration soulève une question légitime : l’État haïtien a-t-il encore l’audace de condamner ce genre d’acte, après avoir donné un boulevard aux gangs criminels ?
Car derrière les mots forts du communiqué, le constat reste le même : l’État haïtien n’a jamais pris de mesures concrètes et durables pour sortir le pays de la spirale de violence qui le ronge. Les groupes armés continuent d’imposer leur loi, souvent en toute impunité, tandis que les citoyens, eux, sont livrés à eux-mêmes. L’incendie de l’Oloffson, emblème culturel et historique, marque une nouvelle escalade dans une crise sécuritaire qui a trop duré — et que les autorités semblent subir plus que combattre.
En condamnant cet acte, l’État tente de donner l’image d’une réaction forte. Mais pour beaucoup, cela ressemble davantage à une posture politique qu’à une réelle volonté de changement. La promesse de « tolérance zéro » sonne creux dans un pays où l’impunité est la norme et où les institutions peinent à exister.
Le feu qui a consumé l’Oloffson pourrait bien devenir un symbole de plus : celui de l’inaction gouvernementale face à la barbarie, et d’un peuple qui, en l’absence de réponses concrètes, doit encore une fois panser ses propres plaies.
Mozard Lombard,
mozardolombardo@gmail.com