Haïti : Le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince inauguré à Delmas 75, mais la violence à Mirbalais éclaire l’incapacité de l’État à rétablir l’ordre

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Pendant que les autorités haïtiennes se réjouissent de l’inauguration du nouveau Tribunal de Première Instance à Delmas 75, un événement survenu à plusieurs kilomètres de là illustre le contraste frappant entre les ambitions gouvernementales et la réalité sur le terrain. En effet, à Mirbalais, une ville du centre du pays, des bandes armées ont pris d’assaut la commune, incendiant la prison civile et libérant plus de 530 prisonniers. Face à cette déstabilisation, de nombreux habitants de Mirbalais ont fui leurs maisons, cherchant refuge ailleurs, tandis que la ville est en train de sombrer dans le chaos. Ce tableau inquiétant soulève des questions sur la capacité réelle de l’État haïtien à gérer l’insécurité croissante qui ravage le pays.

L’inauguration du Tribunal de Première Instance, présidée par Son Excellence Fritz Alphonse Jean, président du Conseil présidentiel de Transition (CPT), en présence de personnalités telles que le Premier Ministre Alix Didier Fils-Aimé et le ministre de la Justice Patrick Pelissier, a été perçue par le gouvernement comme un pas significatif vers l’amélioration de l’accès à la justice. Le président du CPT a souligné que ce projet symbolise un effort de modernisation des institutions judiciaires, malgré le climat de violence généralisée. Cependant, cet événement semble plus relever du symbole que de l’action concrète face à l’urgence de la situation sur le terrain.

Le ministre Pelissier, dans son discours, a insisté sur la nécessité de rétablir la paix dans le pays, tout en exprimant la ferme volonté du ministère de la Justice de soutenir les forces de l’ordre. Il a salué le travail des policiers, des militaires et des missions multinationales, tout en annonçant l’acquisition de nouveaux équipements pour améliorer les conditions de travail des forces de sécurité. Mais malgré ces engagements, la réaction des autorités face à des événements aussi graves que l’attaque de Mirbalais reste timide, laissant l’impression que le gouvernement agit plus en réaction qu’en prévention.

À côté de ces déclarations officielles, la réalité de l’insécurité sur le terrain montre un État haïtien dépassé. Les habitants de plusieurs régions du pays vivent dans une peur constante, alors que les autorités semblent se contenter de mises en scène de réformes et de promesses non tenues. Mirbalais, désormais dans les griffes des bandits, illustre la passivité du pouvoir face à l’extension des zones de non-droit. La délocalisation du Tribunal de Première Instance et la construction de nouveaux bâtiments judiciaires, bien qu’importantes, apparaissent comme de simples réponses symboliques à une crise beaucoup plus profonde.

Le pays traverse une période particulièrement difficile, marquée par l’instabilité, la violence et l’incapacité des autorités à garantir la sécurité de leurs concitoyens. Le Conseil Présidentiel de Transition semble se concentrer davantage sur des réformes administratives et des déclarations publiques, plutôt que de s’attaquer aux causes profondes de la crise. Le peuple haïtien, quant à lui, continue de souffrir, et la nécessité d’un véritable sursaut populaire semble plus pressante que jamais. La situation de Mirbalais, où des bandits occupent désormais la ville, démontre que la crise est bien plus vaste qu’une simple question de justice : il s’agit d’une crise de sécurité nationale.

Mozard Lombard,

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