Le communiqué sanctionnant l’ouverture de la IVᵉ Conférence des Ambassadeurs se veut solennel et ambitieux. Il révèle surtout une diplomatie engluée dans l’autosatisfaction, l’abstraction stratégique et l’absence flagrante de mécanismes concrets de redevabilité.
Trois « interventions majeures » auraient, selon le texte officiel, défini les grandes orientations de la diplomatie haïtienne. Pourtant, à la lecture attentive du communiqué, aucune mesure précise, aucun calendrier opérationnel, aucun indicateur d’évaluation ne sont fournis. La rhétorique l’emporte largement sur l’action. La « diplomatie cohérente et active » invoquée par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, reste un slogan creux tant que le renforcement de la gestion des missions, l’amélioration de l’image du pays et la consolidation de la présence internationale d’Haïti ne sont pas traduits en décisions vérifiables.
Le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé rappelle, de son côté, le rôle « essentiel » de la diplomatie pour la stabilité, la sécurité et le relèvement national. Là encore, le communiqué s’arrête à l’intention : la « mobilisation du réseau diplomatique » est présentée comme une évidence, sans qu’on sache comment ce réseau, ni avec quels moyens, ni selon quelles priorités concrètes, appuiera la reconstruction et les partenariats stratégiques annoncés.
Quant au Coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition, Laurent Saint-Cyr, il projette la Conférence dans une perspective s’étendant de 2026 à 2050. Cette projection lointaine, censée inspirer, souligne surtout le décalage entre l’urgence des défis actuels et la tentation de repousser les responsabilités dans un futur théorique. Défense des intérêts haïtiens, protection des citoyens à l’étranger, appui au plan sécuritaire, relance économique : la liste est longue, répétitive et déjà connue, mais demeure non hiérarchisée et dépourvue d’engagements mesurables.
Au final, le communiqué se conclut par une profession de foi en faveur d’une diplomatie « modernisée, disciplinée et orientée vers des résultats concrets ». Or, le document lui-même illustre exactement l’inverse : une communication institutionnelle saturée de formules générales, incapable de démontrer en quoi cette modernisation serait effective, ni comment les résultats annoncés seront atteints.
Cette IVᵉ Conférence des Ambassadeurs apparaît ainsi moins comme un tournant que comme un exercice de langage, où l’affichage de grandes orientations tient lieu de politique publique. En l’absence de transparence sur les actions à venir, la diplomatie haïtienne continue d’être décrite, non pas telle qu’elle agit, mais telle qu’elle aimerait être perçue.
Mozard Lombard,
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