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Subvention de rentrée scolaire : un point de presse plein de chiffres, mais peu de réponses aux vraies questions

À l’occasion d’un point de presse conjoint tenu dans les locaux du FAES, les directeurs généraux du Fonds d’Assistance Économique et Sociale (FAES) et du Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) ont présenté un bilan d’étape du programme de transferts monétaires pour la rentrée scolaire 2025–2026. Si les chiffres avancés semblent prometteurs, les préoccupations fondamentales autour de la transparence, de l’inclusion et de l’impact réel du programme demeurent sans réponses claires.

D’après M. Yves Roblin, Directeur Général du MENFP, près de 200 000 parents figurent sur la liste des bénéficiaires, sélectionnés via la base de données du Système d’Information de Gestion de l’Éducation (SIGE). Ce chiffre impressionne, mais il soulève d’emblée une question cruciale : quels sont les critères de sélection utilisés ? Sur ce point, aucune explication détaillée n’a été fournie. À l’ère de la crise économique profonde et de la pauvreté galopante, l’exclusion d’une partie significative de la population vulnérable, faute de données actualisées ou accessibles dans le SIGE, reste un angle mort inquiétant.

Le FAES, par la voix de son Directeur Général M. Serge Gabriel Collin, a mis l’accent sur les modalités techniques du transfert : 153 290 parents ont déjà reçu leur aide, soit environ 77 % des bénéficiaires annoncés. Le recours aux plateformes MonCash (Digicel) et NatCash (Natcom), qui ont permis de distribuer respectivement 50 670 et 102 620 transferts, illustre une certaine efficacité logistique. Pourtant, au-delà de ces statistiques, aucune mention n’a été faite des difficultés concrètes rencontrées sur le terrain : problèmes d’accès aux services mobiles dans certaines zones rurales, erreurs de numéros, retards techniques, ou encore frais de retrait additionnels dans les points de service.

Le montant de 15 000 gourdes, auquel s’ajoutent 380 gourdes de frais de transaction, pourrait sembler suffisant pour soulager ponctuellement certaines familles. Mais face au coût moyen de la rentrée scolaire en Haïti – qui dépasse largement ce montant entre uniformes, manuels, inscriptions et transports – il ne s’agit que d’un pansement temporaire sur une plaie chronique. Aucun plan complémentaire n’a été évoqué pour renforcer les capacités des écoles ou alléger les frais imposés par les établissements, pourtant souvent hors de portée pour les familles les plus pauvres.

Enfin, les deux institutions ont vanté la transparence du processus, affirmant que tous les noms proviennent exclusivement du SIGE et que la gestion est rigoureusement contrôlée. Mais à défaut d’un mécanisme indépendant de vérification, ou d’un canal clair pour les réclamations des parents lésés, ces déclarations relèvent davantage de l’autosatisfaction que d’une réelle volonté d’imputabilité.

En somme, ce point de presse a mis en lumière les efforts institutionnels déployés pour soutenir les familles haïtiennes à la rentrée scolaire. Mais il a aussi révélé, en filigrane, les limites d’un programme encore trop centré sur des performances chiffrées, au détriment d’une approche plus équitable, transparente et humaine. Les belles promesses ne suffisent plus : il est temps de donner des réponses concrètes aux familles qui, aujourd’hui encore, attendent plus qu’un virement sur leur téléphone.

Mozard Lombard,

mozardolombardo@gmail.com

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